Face aux barons des ondes, les podcasts, nouvelles radios libres ?

En marge des barons des ondes avec leurs chroniqueurs politiques en fin de mandat, les podcasts sont-elles les nouvelles radios libres ?

En radio, il y a deux bandes. En 2017 plus que jamais. La rentrée divise nettement le média radio en deux tendances : d’un coté, il y a les podcasts, et de l’autre, les radios traditionnelles avec leurs chroniqueurs reluisants. Et parfois, on se demande si cela ne fait pas un peu fin de règne des vieux barons des ondes.

Roselyne Bachelot avait ouvert la marche en 2012, sur la chaîne C8. En 2017, fournée suivante : une dizaine de personnalités politique privées de mandat se sont présentées au mercato des médias à la rentrée. Aurélie Filippetti, ministre de la culture sous François Hollande, et Gaspard Gantzer, ancien conseiller en communication de François Hollande, ont annoncé vendredi 25 août qu’ils rejoignaient les polémistes de l’émission « On refait le monde », sur RTL.
La porte-parole de La France insoumise, Raquel Garrido, tiendra une chronique hebdomadaire dans l’émission de Thierry Ardisson « Les Terriens du dimanche », diffusée sur C8. Henri Guaino, ex-conseiller de Nicolas Sarkozy et ancien député LR des Yvelines, tiendra quant à lui un éditorial quotidien dans la matinale de Sud Radio. Axelle Lemaire, ex-secretaire d’Etat au numérique sous Hollande, a fait savoir le 27 août sur Twitter qu’elle était « très heureuse de rejoindre France Culture pour discuter innovation et cultiver l’esprit d’ouverture », en référence à l’émission « Soft Power » animée par Frédéric Martel. »Vont-ils être considérés comme des journalistes à part entière et, preuve en est, pouvoir brandir leur carte de presse ? Peut-être pas, même si rien ne l’interdit », s’inquiète Libération.

21105868_10155654911134812_388509519300385844_nIl est certain que ces nouveaux visages déjà vus n’ont pas forcément l’intention de mettre la main à la pelle pour combler le fossé entre « les médias et les élites », selon la dichotomie exprimée presque tous les jours sur Twitter depuis que le réseau de l’oiseau bleu existe.

Excentrés des réalités et adeptes de l’entre-soi

Le reproche est fait aux personnalités politiques d’être excentrés des préoccupations quotidiennes du reste des Français : l’éducation des enfants, le logement, l’offre culturelle à proximité de leur lieu de vie, le travail, les relations sociales, les questions de santé …autant de problèmes qui ne se vivent pas de la même manière selon qu’on vit d’un côté ou de l’autre de l’enceinte des grandes villes du pays. Deuxième grief : l’entre-soi, terme qui signifie, dans son versant plus violent, l’exclusion de la zone de dialogue de tout individu exogène (Couleur de peau, degré d’études et écoles fréquentées, origines sociales, …).

Peut-on pour autant se satisfaire d’une rhétorique dégagiste ou d’un : « un politique, ça va, c’est quand ils sont trop nombreux que ça ne va plus ! » ; « ils prennent la place de jeunes journalistes ! ».

L’arrivée de chroniqueurs qui ont une expérience de la vie publique, qui sont rompus à la prise de parole et adeptes des « petites phrases » qui piquent ne parait pas, au plan éditorial, une chose regrettable.

En terme d’audience, le pari peut s’avérer gagnant. S’il on fait fi de tout parti pris ou d’affect, force est de constater que Roseline Bachelot, par exemple, a excellé en chroniqueuse TV : elle sait faire le buzz, zapper de l’info à l’infotainement, et n’hésite jamais à tremper les mains dans le cambouis des polémiques, source d’audience et de bruit sur les réseaux sociaux.

Fondamentaux du journalisme et innovations ?

Du côté de l’offre Podcasts, l’audio à la demande (un million de podcasts seraient déjà consommés chaque jour en France et, aux États-Unis, 46 millions d’auditeurs écoutent en moyenne 5 podcasts par semaine), la recherche d’une audience fidélisée va de pair avec un souhait de renouer avec les fondamentaux du journalisme. Il s’git de séduire des internautes sensibles à la qualité et à l’originalité des contenus, mais aussi à l’indépendance de l’information. En ligne de mire : les millenials.

Nous en voulons pour preuve la nomination de David Carzon, ex-directeur adjoint de la rédaction de Libération, qui rejoint le réseau de podcast Binge Audio en tant que directeur général délégué, directeur de la rédaction. Il aura la responsabilité de l’ensemble des activités éditoriales de l’entité cofondée fin 2016 par Joël Ronez (ex-directeur des nouveaux médias de Radio France) et Gabrielle Boeri-Charles. Leur but : « créer de nouvelles écoutes« , confie à Intégrales Joel Ronez.

Le podcast, format pionnier du web 2.0 et de la délinéarisation des médias, s’épanouit et se diversifie à travers des formats très élastiques : natif web, inspiré des narrative non-fiction et des longs formats de la presse écrite, laboratoire d’idées et de sons.

Pour réaliser soi-même un podcast, un smartphone suffit pour enregistrer et poster sur une plateforme d’hébergement adéquate.

Plus segmentée que la radio hertzienne, l’offre Podcast rompt avec la logique de média de masse. « Pensés pour une communauté d’intérêts, les podcasts natifs ont par essence une plus forte identité« , corrobore Xavier Filliol.

En ces trois aspects, les nouveaux venus à l’instar de Binge et de Boxsons rappellent la grande époque des radios libres, ….leurs grandes soeurs qui ont juste pris un coup de vieux.

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Clara Schmelck
Clara-Doïna Schmelck, journaliste, philosophe des médias. Rédactrice en chef adjointe d'Intégrale - est passée par la rédaction de Socialter ; chroniqueuse radio, auteur, intervenante en école de journalisme et de communication (Celsa ...).

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