Projet de loi sur la circulation des « Fake News » : Macron vise l’offre sans s’interroger sur la demande

Mercredi, dans ses voeux adressés à la presse, le Président de la République a fait part de son intention de trouver une issue législative au ruissellement constant de fausses nouvelles. Mais, une loi contre les « fake news », tant est si bien qu’elle permette effectivement aux organes de presse et aux plateformes en ligne de se saisir et de signaler des contenus « délibérément faux », ne peut être en mesure de résoudre le problème de fond : il y aura nécessairement sur le net une offre de « fake news » aussi longtemps que la demande sera pressante. S’il on veut diminuer la demande pour ce type de « news », l’autorité de la loi ne remplace pas le pouvoir de l’éducation publique populaire.

A l’occasion de ses voeux à la presse, Emmanuel Macron a annoncé mercredi 3 janvier qu’un « texte de loi » allait être déposé « prochainement » pour lutter contre la diffusion et la circulation des fake news sur Internet, en « période électorale ». Le projet de loi devrait être présenté « probablement avant la fin de l’année » devant le parlement, a complété jeudi le porte-parole du gouvernement, Benjamin Griveaux. L’initiative du pouvoir exécutif, dont les contours sont moins d’être concis, a suscité un sentiment de circonspection de la part des journalistes et des divers acteurs des médias.

Emmanuel Macron en tant que candidat puis en tant que président a subi les effets de ces boues de fausses nouvelles qui embourbent en permanence les réseaux sociaux. Les fake news colportées depuis des sites russes et américains ont bien failli faire tomber le candidat à l’Elysée. Puis, depuis mai 2017, rumeurs et autres informations délibérément fausses n’ont cessé de représenter une nuisance pour la communication Elyséenne. Le programme et les projets portés par Emmanuel Macron font l’objet de fake news sur les réseaux sociaux. Selon une intox qui a circulé sur Facebook, le nouveau président de la République allait supprimer « par ordonnance dès la rentrée 2017-2018 » les APL et les bourses étudiantes, ce qui aurait fait « une économie de 50 milliards d’euros par an. Or, vérifications faites, de telles mesures n’apparaissent nulle part dans le programme d’En marche ! Il est donc peu étonnant que le président de la République évoque cette question devant la presse.

« Je ne peux que saluer la volonté d’Emmanuel Macron de s’attaquer à ce sujet. Dans La Démocratie des crédules (Puf, 2013), j’ai démontré à quel point la diffusion des « croyances » reposant notamment sur des « fake news », leur viralité amplifiée par les réseaux sociaux représentent un danger pour nos démocraties. L’ONU s’inquiète aussi de la prévalence croissante des fausses informations » dit le sociologue Gérald Bronner, professeur à l’Université Paris-Diderot, dans L’Opinion.

Mais, comment lutter contre la propagation de tels « fake news » qui nuisent à la lecture d’un projet politique et à sa critique fondée par les citoyens ? Et comment « évaluer la malveillance de la diffusion, son caractère intentionnel ou pas », comme le formule Gérald Bronner.

En mars dernier, Intégrales s’était procuré le projet de texte de loi qui vise à encadrer pénalement l’édition, la diffusion et la reproduction de fausses nouvelles, rédigé par la sénatrice Nathalie Goulet le 23 mars 2017. Dans un projet de texte intitulé « PROPOSITION DE LOI visant à définir et sanctionner les fausses nouvelles ou « fake news » », la sénatrice de l’Orne Nathalie Goulet propose d’obliger les personnes pouvant, «par voie numérique», publier, diffuser, reproduire ou référencer des nouvelles, «à en vérifier le contenu». Selon la sénatrice, la présente proposition de loi s’est « imposée » au regard de l’actualité récente. Elle en veut pour preuve le référendum du 23 juin 2016 sur le « Brexit » au Royaume-Uni, l’élection présidentielle aux États-Unis d’Amérique du 8 novembre 2016 ou encore les débats parlementaires en Allemagne, au Royaume-Uni et aux États-Unis d’Amérique.

La sénatrice justifie de légiférer sur les « Fake News », malgré le cadre de la loi de 1881 qui protège la liberté de la presse, par le changement structurel qui marque la presse depuis l’arrivée d’internet et des réseaux sociaux où les nouvelles sont diffusées : elle estime que l’internet a donné lieu à une presse qui n’est « n’est plus constituée majoritairement de journalistes de métier, consciencieux et expérimentés, ou de jeunes pigistes animés par les idéaux éthiques de la profession« , et qu’il a rallongé à l’infini la durée de consultation des publications, autrefois éphémères. Le texte de Nathalie Goulet préconise une échelle de sanctions, qui s’échelonne d’une peine d’un à cinq ans de prison et d’une amende de 15 000 à 100 000 euros pour sanctionner la diffusion de fausses nouvelles élaborées de mauvaise foi. En ce qui concerne la préconisation des peines les plus hautes : « Art. 226-12-4. – Les peines sont portées à trois ans d’emprisonnement et à 75 000 euros d’amende lorsque la publication mise à disposition présente soit des apparats de l’acte authentique ou ceux de l’Autorité publique, soit des similitudes volontairement trompeuses avec la mise en page habituellement utilisée par une entreprise éditrice de presse au sens des articles 1 et 2 de la loi n° 86-897 du 1er août 1986 ou par une agence de presse au sens de l’article 1 de l’ordonnance n°45-2646 du 2 novembre 1945. «Art. 226-12-5. – Les peines sont portées à cinq ans d’emprisonnement et à 100 000 euros d’amende lorsque l’infraction définie à l’article 226-12-1 est commise en bande organisée. » Quant à la « mauvaise foi », elle se définit comme suit : « Doit notamment être considéré de mauvaise foi, l’éditeur, le diffuseur, le reproducteur, le moteur de recherche ou le réseau social ayant maintenu à la disposition du public des nouvelles fausses non accompagnées des réserves nécessaires pendant plus de trois jours à compter de la réception du signalement par un tiers de leur caractère faux. »; A cet égard, le projet de texte précise que : « l’éditeur, le diffuseur, le reproducteur, le moteur de recherche ou le réseau social ayant maintenu à la disposition du public des nouvelles fausses non accompagnées des réserves nécessaires pendant plus de trois jours à compter de la réception du signalement par un tiers de leur caractère faux. »

Il s’agirait dans les faits de voir comment ce dispositif pourrait s’articuler avec les admonestations et sanctions prévues par le CSA, le conseil supérieur de l’audiovisuel. Pour éviter les condamnations expéditives,le projet de texte prévoit que : « L’éditeur, le diffuseur, le reproducteur, le moteur de recherche ou le réseau social à qui a été signalé le caractère faux des nouvelles peut néanmoins démontrer sa bonne foi en rapportant la preuve de l’accomplissement de démarches suffisantes et proportionnelles aux moyens dont il dispose afin de vérifier le contenu et l’origine de la publication mise à disposition. », précise le texte. Va t-on alors vers une multiplication de dispositifs de « Fact checking » au sein de chaque rédaction, avec éventuellement des équipes dédiées ?


Liberté de la presse

Si un tel projet de loi parait louable pour lutter contre la propagation d’informations fausses, notamment sur les réseaux sociaux, le risque est qu’il en vienne à mettre en péril la liberté de la presse. C’est pourquoi le projet de loi entend que :« Art. 226-12-10. Les entreprises éditrices de presse au sens des articles 1 et 2 de la loi n° 86-897 du 1er août 1986, les agences de presse au sens de l’article 1 de l’ordonnance n°45-2646 du 2 novembre 1945 et les syndicats de journalistes peuvent, si ils se prétendent lésés par l’infraction prévue par cet article, porter plainte avec constitution de partie civile ou se constituer partie civile. » et rappelle la stricte définition d’une « nouvelle », qui doit être distinguée d’un propos relevant de l’ »opinion », c’est à dire de l’interprétation des faits : « Une nouvelle est l’annonce de faits précis et circonstanciés, actuels ou passés faite à un public qui n’en a pas encore connaissance.« .

Identifier le faux

La question des fausses nouvelles est un vieux serpent de mer de la communication politique qu’internet n’a fait qu’actualiser.

Depuis l’intensification du volume de « fake news » à échelle supra-étatique, phénomène induit par la libre circulation des flux d’information sur le net, les grands médias n’ont pas manqué de tenter de neutraliser la bête. Mais le problème d’un outil à l’instar du Decodex du Monde est qu’il peut pousser incidemment le lecteur à renoncer à définir la vérité par son adéquation au réel mais à l’identifier par un biais critère de validité qui n’est pas rationnel, à savoir le caractère officiel du contenu.

Imaginé et développé avec Google, le « Décodex » de la rédaction du journal Le Monde a pour objectif de fournir au plus grand nombre des outils simples pour faciliter la vérification des informations. « Nous avons conscience qu’il ne permettra pas de vérifier toutes les informations qui circulent en ligne, mais nous pensons qu’il offrira à chacun les moyens de discerner les plus évidentes d’entre elles, et d’être averti lors de la consultation d’un site connu pour diffuser de fausses informations.« , prévient l’équipe du Décodex. Reste à se demander qui décodera le Decodex du Monde, juge et partie, lequel s’autorise, au nom de la lutte contre les fake news, à mettre littéralement à l’index certains médias, tels que Valeurs Actuelles ou Russia Today, estampillés d’une pastille violette. Les « avis » que donne Le Monde sur ces sites, catégoriques et sans fondement, c’est à dire dénués d’explications causales, ressemblent davantage à des opinions. Preuve que Le Monde n’est qu’un journal, et ne pourrait avoir le statut d’instance suprême garante du journalisme authentique.

Problème : ce mode opératoire invite le lecteur à une attitude qui est simplement à l’opposée des producteurs et des consommateurs de Fake news : « c’est officiel donc c’est validé, donc c’est vrai » est l’opposé de « c’est officiel donc c’est mensonger donc c’est faux. ».

De plus, parler de la vérité, c’est, qu’on le veuille ou non, ramener la vérité au statut d’une entité prenant part au discours, et c’est ainsi aller à l’encontre de ce que la vérité est, à savoir non pas une partie parti prenante au discours, mais le tout et le fond même du discours.

La catégorie de Fake News nous induit ainsi paradoxalement à s’intéresser moins aux faits eux-mêmes qu’à la notion de vérité, posée comme une valeur absolue qu’il conviendrait ou bien d’ériger en idéal moral, ou à contrario de nier au nom d’un relativisme radical.

Le danger est de croire que c’est chaque esprit qui crée le vrai ou le faux. A chacun sa vérité ! L’esprit crée la croyance, mais une fois qu’elle est là, ce n’est pas l’esprit qui la rend vraie ou fausse, c’est le fait qui rend la croyance vraie, et ce fait ne présuppose pas l’esprit de la personne qui est le sujet de la croyance.

Chercher le faux dans les faits

les 37 médias français qui ont créé la plateforme collaborative Cross Check, soutenus par le Google News Lab et le réseau First Draft, partent ainsi du principe que la vérité n’existe pas hors des faits. 250 journalistes sont invités à Mutualiser leur connaissance des faits et leur travail de vérification sur le site Cross Check. Important : l’information n’est traitée sur le site de Crosscheck qu’à la condition d’avoir été examinée par deux rédactions au minimum.

« Le CSA a-t-il interdit la Marseillaise et le drapeau français dans les clips de l’actuelle campagne ? » est une information à recevoir avec « prudence » avertissent Ouest France, Rue 89 Strasbourg, Buzzfeed et LCI. Même démarche du côté de Facebook depuis le 6 février: «Lorsqu’une publication sera qualifiée de fake news par deux des organisations partenaires, elle ne sera pas censurée, mais signalée par un pictogramme, précise sur Facebook Laurent Solly, directeur général de Facebook France. Huit grands médias français (AFP, France TV, France 24, BFM TV, L’Express, Le Monde, Libération et 20 Minutes) recevront la mission d’invalider ces contenus « fake », qui ne seront plus génératrices de recettes publicitaires au moyen de Facebook ads.

Voir la vérité des fake news

Reste qu’une information, qui est un discours médiatique, ne se réduit pas au contenu à prétention informative : elle est indissociable de sa situation d’énonciation. Autrement dit, qui publie l’info, à quel moment, dans quel média : tous ces éléments, de l’ordre du discours, font partie de ce dont il s’agit de juger vrai ou faux.

informés par la presse, les citoyens Français étaient au courant des manoeuvres pro-Trump et pro-Poutine, pro-FN, pour déstabiliser le candidat centriste Emmanuel Macron. La démarche populaire a été de chercher non pas si les #MacronLeaks disaient vrai sur Macron, mais d’où venait l’information. Les documents n’ont pas été simplement analysés un par un pour être classés comme vrais ou faux, mais interrogés en tant que discours médiatique : un envoi sur le net, par des hackers extrémistes, la veille de la fin officielle de la campagne présidentielle, d’un corpus composé d’une somme de documents numérique à charge contre le candidat d’ « En Marche! ».

C’est ce qu’a su prouver, data à l »appui, à ses 15 000 followers sur Twitter le chercheur belge Nicolas Vanderbiest, qui a réussi à identifier qui était à l’origine du montage (un compte américain de propagande d’extrême droite).

Ainsi, dans la soirée même où ils ont été propagés, les pseudo « Macron-Leaks » ont été interprétés pas seulement comme une « fake news » (les Macron-Leaks regorgeaient de faux) mais comme un discours, un corpus de documents consultables sur le net, qui exprime une vérité : l’acharnement de l’extreme droite américaine et russe contre Emmanuel Macron.

D’où la distance dont a su faire preuve la majorité des électeurs face à ces pseudo « Macron Leaks » jetés pour influencer les masses et renverser le sens du scrutin. Les fake news sont des faux du fait de ce qu’ils prétendent rapporter. Mais, sur le plan du discours, ils expriment une vérité : l’intention des producteurs des contenus faux.

Ce n’est pas celle qu’ils veulent transmettre, mais c’est bien celle qu’il nous faut démasquer pour désamorcer les « fakes » qui pourrissent le débat public.

Dans un article intitulé « dans le laboratoire de la « fake science », le quotidien suisse Le Temps s’est inquiété de l’influence d’Emil Kirkegaard , un étudiant danois qui instrumente des savoirs et des techniques scientifiques pour analyser toutes les données qu’il trouve en ligne afin de prouver pseudo-scientifiquement une supposée hiérarchie génétique entre les humains, avec les Occidentaux et Asiatiques en haut de la pyramide, Africains et Roms au ras de l’échelle. «Il est la version scientifique de l’alt-right, cette mouvance américaine d’extrême droite suprématiste», explique au Temps Paul-Olivier Dehaye, mathématicien et co-fondateur de Personaldata.io. Kirkegaard est l’auteur d’une soixantaine d’articles de recherche, autour de sujets racialistes : «Les résultats scolaires des migrants dans les écoles primaires danoises prévisibles en fonction de leur pays d’origine»; «Pays d’origine et aides sociales: les stéréotypes sont valides au Danemark»; «Criminalité et pays d’origine en Allemagne», etc.

A l’inverse du scientifique, le pseudo-scientifique est persuadé d’une vérité avant de rencontrer les faits : «Je cherche simplement à comprendre le fondement des inégalités entre les humains, et je ne pense pas qu’elles dépendent uniquement de leur environnement ou de leur éducation.» décrit Emil Kierkegaard pour justifier la légitimité de sa démarche.

Ce fonctionnement mental,qui consiste de partir d’un dogme pour l’étayer d’énoncés (photos, vidéos textes, …) au lieu de tirer une conclusion à partir de l’expérience, nous le retrouvons exactement chez les producteurs de fake news.

Un type de discours

Car une fake news n’est pas ce hâtif erratum que l’on peut repérer dans un article de presse, dans la bouche bavarde d’un commentateur de télévision ou à travers la conférence fleuve d’un universitaire. Si par exemple, Le Monde attribue à Emmanuel Macron une citation prononcée le même jour par François Fillon, il s’agit tout simplement d’une erreur – d’un fail, en anglais et non d’un fake. The Atlantic, fin 2015 a qualifié trop hâtivement de « fake news » un article dans lequel le New York Times a écrit, à tort, que l’auteur de la tuerie de San Bernardino avait publié des appels au djihad sur les réseaux sociaux. Plus bas dans l’article, The Atlantic parle de manière plus mesurée d’article « imprécis » (inacurrate), remarque Les Décodeurs du Monde.

Les fake News relèvent en réalité d’un type de discours : elles forment un tissu discursif imposé comme des faits indiscutablement vrais sur des sites web ou des réseaux sociaux dont l’objectif est de solliciter en même temps que la confiance du lecteur, sa crédulité inconditionnelle. Ils ne s’opposent pas à la vérité, mais l’amoindrissent et la pervertissent.

Dans ce qu’on appelle « Fake News », la rupture ne se situe pas dans l’erreur, ni même dans la partialité éventuelle de la source d’information, mais dans le contrat de lecture qu’une plateforme de contenus engage avec son lecteur. Alors qu’un site de presse professionnel va chercher à informer, tout en hiérarchisant l’importance des événements et en choisissant ses angles d’approches pour convaincre, un relais de fakenews (un site, un individu) va chercher à persuader.

Le refus d’enquêter

Lorsque Le Figaro titre : « Jean-Luc Mélenchon, un projet dévastateur pour la France », le quotidien développe une argumentation qui vise à convaincre le lecteur des risques que comporterait l’élection du candidat de la France Insoumise à la tête de l’Etat. Le titre n’est ni vrai ni faux, il est partial, et cette partialité éditoriale est justifiée de bout en bout de l’article au moyen d’arguments et d’informations chiffrées, sources à l’appui. Certes, certains a priori économiques orientent la recherche des faits et la terminologie de l’article.

« Mélenchon prévoit également une hausse de 120 milliards d’euros d’impôts et la confiscation de tous les revenus supérieurs à 400.000 euros annuels » : en lisant cet énoncé, le lecteur est libre de se réapproprier ces éléments factuels pour les reconstituer autrement dans son esprit, de remplacer mentalement « confisquer » par « récupérer » et de conclure qu’au contraire, il est opportun pour la nation de porter Jean-Luc Mélenchon au pouvoir.

Les sites de fakenews ne partent pas de sources factuelles pour aller vers une conclusion, mais traitent de tout sujet à partir d’un axiome, qui est toujours identique : les médias mentent. Cet axiome, indémontrable, irrévocable, ne relève même pas du préjugé ou de l’opinion, mais de la superstition la plus obscure. « La réinformation ? C’est partir du principe que les médias traditionnels nous mentent, ou cachent une partie de la réalité. », expose Louis Lorphelin, qui s’est présenté comme un « consommateur et producteur de réinformation », au cours d’un entretien accordé à l’Atelier des Médias de RFI en mars 2017.

A travers cette vue de l’esprit, le producteur ou le consommateur de fake news, au contraire du journaliste, ne recherche pas la réalité en sa vérité au moyen d’une enquête, car il croit la connaître déjà. La notion d’enquête est entièrement court-circuitée. C’est donc en amont qu’il convient de lutter contre l’offre et la demande de fake news.

Eclairer les élèves sur la question de l’origine de l’information a pour enjeu la possibilité d’une expérience objective de l’information : pour que les élèves soient en mesure de lire/visionner/entendre l’information sans réduire les contenus à une composition de données sensibles par l’imagination, il faut leur donner les moyens d’opérer une mise en ordre rationnelle des contenus qui arrivent en continu sur leur smartphone. Cette mise en ordre consiste à relier et réunir la diversité des données issues des contenus, ce qui passe par un questionnement sur la source (origine) et le fondement (explication rationnelle) d’une information livrée tel un fait.

Loi et instruction publique

La loi n’a de sens que dans le contexte d’une éducation populaire qui dispense une acuité à la lecture de l’information, autrement dit, la loi ne peut être valable que si elle s’applique à une population instruite.

La démarche « d’éducation aux médias » initiée dans certains pays comme la France ou la Suisse a pour postulat de départ que c’est la raison qui fonde l’objectivité de l’expérience de lecture de l’information. Tel est le sens de la semaine de la presse à l’école en France : conduire les élèves à raisonner devant l’information plutôt que de consommer. Les « Fakenews » existent depuis que les animaux humains sont dotés de la faculté de parole. Leur impact sur la vie civile est fonction de l’acuité des lecteurs. Et c’est en cela que l’idée d’une « instruction publique » aux médias prend sens.

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Clara Schmelck
Clara-Doïna Schmelck, journaliste, philosophe des médias. Rédactrice en chef adjointe d'Intégrale - est passée par la rédaction de Socialter ; chroniqueuse radio, auteur, intervenante en école de journalisme et de communication (Celsa ...).

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